Il a du mal à émerger. Parmi les bouteilles de bière, il ne reconnaît plus son appartement. Son chat arrive, il l'entend miauler à travers le salon, et il échappe un rire en le voyant, sans trop savoir pourquoi. Il avait encore trop bu. Mais il ne pouvait pas s'en empêcher, c'était plus fort que lui. L'alcool était pour lui le meilleur moyen d'oublier, et quand ça n'était pas la bière, c'était dans le Whisky irlandais qu'il s'adonnait.
L'absence de Jenny était trop remarquable. Elle n'était plus là, plus là pour lui glisser quelques mots d'amour, plus là pour l'embrasser, faire l'amour, lui donner un calin ou un geste tendre. Sa voix lui manquait, sa présence encore plus. Maintenant, elle reposait au cimetière non loin d'ici et il avait du mal à y retourner. Voir sa tombe, c'était comme donner une réalité à la chose et il n'avait pas encore tout à fait fait son deuil. Se laisser aller ne lui ressemblait pourtant pas, mais quand il n'était pas au boulot, rentrer chez lui devenait une épreuve.

"Qu'est ce qu'il y a?" demanda-t-il à l'animal qui miaule pour avoir sa patée. "Elle n'est plus là, d'accord? Elle n'est plus là!"

Et il s'effondre à nouveau en larme. Il commence à avoir la migraine mais la douleur n'est rien comparé à celle qu'il possède depuis quelques mois déjà. On a tué sa femme! Un être humain a fait ça, comment c'est possible? Il n'aurait jamais cru que cela le toucherait un jour. Pourquoi lui? Qu'avait il donc fait au bon dieu pour qu'il lui supprime l'être humain qu'il avait aimé le plus au monde?
Tout à coup, il a un geste brusque et l'une des bouteilles s'éclate au sol. Il repleure alors de plus bel, en pensant que sa réaction était exagérée mais les larmes lui viennent tout seul, sans qu'il n'ait un quelconque contrôle dessus. Il attend alors que ça se calme avant de se baisser pour ramasser les débris. Et là tout à coup, il sent une nouvelle douleur sur sa main. Il la relève alors pour l'observer et voir l'entaille qu'il venait de se faire. Elle n'était pas très profonde mais il ne s'était pas loupé. Il la regarde un long moment avant que la sonnette ne se mette à retentir. Quelqu'un était derrière sa porte et il ne savait pas s'il devait y aller ou faire le mort pour croire qu'il n'était pas là. Il se dirige, méfiant, vers la porte, puis il observe dans le judas pour s'apercevoir que c'était son frère. Bon dieu oui, il devait passer. Pourquoi faire? Il ne le savait plus. Peut être bien que c'était simplement dans le but d'aller lui rendre visite. Il ouvre la porte et s’essuie les larmes avec son bras.

"Juan! Salut, tu vas bien?" demande-t-il en faisant semblant de sourire.